En 2015, soit bien avant l’entrée en vigueur du diagnostic de performance énergétique opposable de juillet 2021, l’exigence de décence énergétique au regard d’une valeur limite de consommation annuelle d’énergie ou de classe énergétique n’était pas encore applicable. Malgré tout, transmettre le DPE dans le cadre d’un contrat de location était déjà obligatoire. Le 23 octobre 2023, la cour d’appel a condamné une commune proche de Colmar qui, lors d’un bail, avait fait abstraction de cette obligation, et ce, d’autant plus que le logement concerné était une passoire énergétique. Voici ce qui s’est passé dans cette affaire dont le passage devant la cour d’appel a obligé le bailleur à verser à la locataire l’équivalent de la surconsommation d’énergie subie depuis la signature du bail.
Location de passoire énergétique en 2015 : pas de DPE dans le DDT de la location
Dans cette affaire, le dossier de diagnostic technique fourni à la locataire par la commune bailleresse lors de la signature du contrat de location en 2015 ne comportait pas de DPE. Or, le logement, doté de quatre pièces, situé dans un ancien presbytère et disposant d’un chauffage tout électrique, consommait beaucoup trop d’énergie. Résultat : la locataire s’est retrouvée à devoir régler des factures d’énergie très importantes, une précarité énergétique qui l’a fortement endettée vis-à-vis de ses fournisseurs d’énergie ainsi que du bailleur de son logement, soit respectivement d’une somme totale de 13 000 euros pour les premiers et de près de 6 100 euros pour le second. Poursuivie par ses créanciers, la locataire a tout de même bénéficié d’un jugement en sa faveur en première instance le 8 février 2022. En effet, elle avait invoqué toutes les anomalies qui rendaient son logement indécent : mauvaise étanchéité de l’enveloppe à l’air et à l’eau, défauts électriques et consommation excessive d’énergie.
Location immobilière sans DPE : la commune bailleresse doit régler le surcoût d’énergie
Devant la Cour d’appel de Colmar, le raisonnement des juges a été différent le 23 octobre 2023. L’arrêt rendu par cette juridiction a infirmé le jugement de première instance pour condamner la commune bailleresse non exclusivement au titre de l’indécence du logement, mais surtout à celui de la non-transmission du DPE. En effet, malgré l’absence de respect à certaines règles de décence du décret en date du 30 janvier 2002, confirmée par le diagnostic électricité réalisé le 28 février 2018 constatant diverses anomalies, c’est principalement le manquement à l’obligation de fournir le DPE qui a été retenu pour aboutir à la condamnation du bailleur.
En effet, cette absence de DPE n’avait pas permis à la locataire d’être informée avant la signature de la transaction de la surconsommation énergétique du logement, une situation qui aurait été détectée et décrite par un tel diagnostic. Le DPE du logement lui aurait permis de tenir compte de la mauvaise isolation du logement et de sa mauvaise performance énergétique au travers de l’attribution d’un classement énergétique « défavorable », soit la note G, la plus mauvaise note du DPE qui, comme F, désigne les passoires thermiques.
Malgré tout, la commune n’a pas été condamnée à verser la totalité des arriérés des factures d’électricité de la locataire, mais juste la valeur de la surconsommation qui a causé la « défaillance de la locataire dans le paiement de ses factures d’énergie ». Il en résulte qu’elle doit verser à la locataire 3 600 euros, soit 30 % des factures d’énergie après déduction du coût de l’abonnement et d’autres frais annexes. À cette somme s’ajoute celle de 1 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi en raison du mauvais état de l’installation électrique et de la non-décence causée par cette situation.